Après avoir essuyé notre première attaque en règle d’opossum hier soir, nous avons préféré dormir dans la voiture.

« J’entends un bruit bizarre » me dit Eva alors que nous mangeons dehors. Je vois alors un énorme opossum essayant de trouver le meilleur angle possible pour grimper sur le dos de ma compère.

« Ne te retournes surtout pas ! » que je réponds avec mon air le plus détaché, sachant qu’elle a une peur bleue de ces bestioles. Dans un pays où crocodiles, araignées, serpents et requins se battent pour la médaille de la créature la plus dangereuse et où, même frôler une pieuvre de quelques centimètres peut vous être fatal (blue-ringed octopus), Eva ne s’est bizarrement pas sentie rassurée pour mon commentaire…S’ensuit une danse bizarre entre deux françaises congelés et deux oppossums affamés. Les françaises gagnent mais rebroussent chemin.

Dans l’impossibilité de planter la tente puisque le sol est gelé, nous regagnons la voiture pour la nuit.

Après un sommeil bien peu réparateur, nous rejoignons l’information center du Lac St Clair pour savoir si les conditions météorologiques sont propices à la marche.

Pour le pas changer, il devrait pleuvoir (ou neiger) une bonne partie de l’après-midi et le brouillard étant très bas sur le mont, il sera difficile de ne pas s’y perdre. La ranger nous conseille donc de pousser jusqu’au premier point de vue sur le lac puis de rentrer tranquillement en longeant celui-ci.

Il est déjà 10h30 et la randonnée dure 7h dans de bonnes conditions. Nous partons coûte que coûte, ne sachant pas trop à quoi s’attendre.

Nous avançons tout d’abord dans une forêt vierge typique de la région (classée au Patrimoine Mondial de l’Humanité). Mousses, champignons de tailles et formes diverses font parfois place à des ruisseaux et cascades. Nous sommes au paradis.

Végétation du Parc

Cascade au Mont Rufus

La neige fait peu à peu son apparition en bordure de sentier et nous marchons souvent dans l’eau glacée des fontes récentes.

Ruisseau

L’ascension débute réellement deux heures plus tard et nous gravirons 700 mètres environ en une heure. La neige se fait plus dense et, parfois, nous arrive à la taille.

Vue sur le Mont Rufus

Pourtant, le temps est magnifique et, à la vue des lacs, la montagne étant dégagée, nous poursuivons notre route vers le sommet du mont.

Eva dans la neige

Attaque sournoise

Une fois sur l’arête nous pouvons admirer en contrebas d’un côté le Lac St Clair, de l’autre la chaine de montagne du Cradle Mountain National Park.

Vue sur la vallée

Twisted tree

Arbre

Au sommet

Lac St Clair du sommet

Au sommet

Il est 15h00 et, une fois notre pierre ajoutée à l’amas formé par les randonneurs passés, nous attaquons notre descente face nord.

La pierre à l’édifice

Le brouillard est compacte et après quelques minutes seulement nous perdons le sentier dans un dédale de pierres. Forcées à rebrousser chemin, nous retrouverons la track un peu plus haut et jurons de ne plus la perdre.

Plus bas, dans les plaines de spiniflex, le sentier est beaucoup plus engageant. Un escalier de bois nous conduit entre les marais et nous apprécions ce décor aquatique en étant au sec, cette fois. Nous rigolons même de notre mésaventure dans le brouillard. Au bord d’une mare, nous croisons un wombat et son petit, trottinant sur le chemin de bois.

Sur le track

Près du Lac Shadow

Mais il est tard et la nuit tombe vite. Nous accélérons le pas. Heureusement, nous n’avons pas fait une seule pause. Au bord du Lac Shadow, que nous pensions déjà avoir dépassé, un panneau indique : Visitor Center 2h30. Il ne reste que trois quart d’heure de jour. Nous courons entre les pierres, en ne prenant plus soin d’éviter les flaques. Nous nous jetons même à corps perdu dans un étang (l’eau doit être proche des 2°C), de l’eau jusqu’au cuisses, le pont de bois étant inondé. Nous rions un bon coup et repartons de plus belle pour nous réchauffer.

La nuit nous rattrape enfin et nous sortons notre lampe.

« Arbre tournant », « Racines », « Cailloux », « Racines glissantes », « Aie ! Gros cailloux » rythment notre avancée dans les bois pendant près de deux heures. Je guide Eva tant bien que mal et finis par perdre le sentier à l’orée d’une clairière. La lampe s’éteint. Dans un dernier espoir, après avoir cherché le chemin à l’aveuglette dans la clairière, nous allumons le réchaud (nota bene : brûle. N’éclaire pas. Dangereux.) La lampe se rallume enfin : nous sommes face au chemin. Nous reprenons de plus belle notre refrain du soir : « Tournant ». « Cailloux glissant ». « Marches ». « Petit pont ». La lampe s’éteindra pour de bon un kilomètre plus loin, nous laissant à quelques mètres des lumières salvatrices  de l’information center. Il est 19h30. Nous avions enregistré notre marche. Pourtant, personne ne s’est inquiété. La réceptionniste du camping nous félicite et nous offre un café bienvenu tandis que nous lui contons nos exploits.

« Vous avez eu de la chance. Y’a trois semaines, une Japonaise. Elle s’est perdu dans le brouillard au sommet du mont. Elle est tombée : heureusement la tête la première sur l’abri. Elle a dormi là-bas. Personne ne s’est inquiété à part ses amis…le lendemain matin. Nota bene 2 : avoir de bons amis…ou prendre une tente avec soi.

Notre aventure en vidéo ici !